LE BOUCLIER DE BOBIGNY >

DOCUMENTAIRE, 80 mn

PRODUCTION LABEL VIDÉO

 


RÉSUMÉ DU FILM 

Yves le Bechennec est archéologue. Il fouille depuis une quinzaine d'années un site de l'âge du Fer à Bobigny, au cœur de la banlieue Nord-Est de Paris. Les vestiges qui ont été découverts, au gré des fouilles archéologiques précédant des opérations immobilières, révèlent l'existence d'une vaste bourgade d'artisans gaulois datant des années 280 aux années 110 avant J.-C. La nécropole du village, découverte dans l'enceinte de l'hôpital Avicenne en 2003, comporte plus de 500 tombes. C'est de loin la plus importante actuellement connue en Europe pour la période gauloise. 

Dans ce cimetière, une tombe intrigue l'archéologue, celle d'un très jeune guerrier inhumé avec son bouclier et sa lance, mais sans épée, ce qui est tout à fait inhabituel. D'un bouclier gaulois, on ne retrouve en général qu'un morceau de fer rouillé, l'umbo, pièce métallique destinée à protéger la main du combattant, le bois et le cuir s'étant décomposés. La restauration de cet umbo va conduire l'archéologue à postuler qu'il s'agit très certainement d'un bouclier d'entraînement, puis à faire fabriquer des répliques de ce bouclier par un artisan expérimentateur spécialiste de la période gauloise, enfin à les tester en combat d'entraînement avec un maître d'arme et un groupe de jeunes de banlieue passionnés par les sports de combat.

Retrouver les gestes des combattants gaulois par l'expérimentation, découvrir si les chocs et déformations obtenus correspondent à ceux relevés sur les pièces retrouvées en fouille, tout en créant du lien social avec les populations locales, voilà l'aventure scientifique et humaine à laquelle Yves le Bechennec nous convie.

 

YVES LE BECHENNEC : COMPRENDRE LES TECHNIQUES DE COMBAT GAULOIS 

Depuis le XIXe siècle, explique Yves le Bechennec, l'intérêt s'est principalement porté sur l'épée utilisée dans une vision de duel homérique. Quoi de plus naturel en effet que d'imaginer des combats à l'épée où les lames s'entrechoquent et s'abattent à grand fracas sur les boucliers ! Le cinéma et ses cascades nous ont nourri de ces images. Or l'épée gauloise, durant les trois siècles où l'archéologie permet de l'observer en Gaule, évolue d'une arme de 80cm de longueur à une arme de plus de 1,20m, sans jamais dépasser le poids de 800g. En l'absence d'acier, cette arme en fer, légère, implique une grande fragilité aux chocs. Cela la rend inutilisable en tant qu'arme de duel et oblige donc à reconsidérer son usage comme celui de l'ensemble de l'armement découvert dans les tombes. Seule l'expérimentation peut permettre de redécouvrir la réalité d'un armement où le bouclier semble jouer le rôle central. Ce renversement des perspectives est le point de départ d'une quête des techniques de combat gauloises qui se concentre sur une pratique qui allie lance et bouclier, l'épée n'intervenant que pour des gestes techniques de type mise à mort en fin de combat ou de défense après perte ou destruction des autres pièces de l'armement.

 

UN ARCHÉOLOGUE, UNE PRATIQUE, DES JEUNES 

Yves le Bechennec est le personnage central du film. C'est à travers lui – on pourrait même dire en même temps que lui – que nous découvrons la tombe du jeune guerrier de Bobigny, que nous suivons la restauration de l'umbo dans un laboratoire spécialisé et assistons à la découverte progressive des traces de réparations, que nous participons à la restitution des répliques de boucliers et à leur mise en œuvre au cours de combats d'entraînement. Nous suivons pas à pas l'évolution de la recherche à travers ses commentaires et ses échanges avec les autres participants : archélogues, restaurateurs, expérimentateurs et jeunes de banlieue.

Mais à la dimension scientifique et expérimentale de cette recherche s'ajoute une dimension sociologique. En effet le fait pour l'archéologue de choisir de travailler avec des jeunes de diverses origines vivant en banlieue et motivés par une même passion lui permet de nouer de nouveaux contacts et d'échanger avec d'autres cultures. Au cours des entraînements des liens se tissent et des échanges culturels opèrent. Ainsi, un des jeunes, Bikramjit Singh, est membre de la communauté sikhe de Bobigny. Sa connaissance de l'usage des armes blanches depuis l'enfance à travers l'entraînement traditionnel au combat, selon les préceptes de sa religion, promet d'être extrêmement intéressante pour la recherche en cours. Sa pratique du Gatka, sport de combat dérivé des techniques guerrières sikhs très anciennes ne peut qu'enrichir l'expérimentation. Au cours des premiers entraînements, il a naturellement utilisé la lance avec des gestes de fauchage que les archéologues n'avaient même pas imaginés ; ce qui est de bon augure quand aux résultats de cette expérimentation.